Tana Toraja

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GÉNÉRALITÉS

Pays: Indonésie / Sulewesi

Voyage: Juillet 2014 / 4 jours, combiné avec Lac Tempe et Bira (3 jours)

Période recommandée: Juillet à Septembre

Durée recommandée: 3-4 jours

Budget: $$

Sites visités: cliquez sur le lien ci-dessous

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ASPECTS PRATIQUES

Transport: Singapour ↔ Makassar : Silk Air, app 350 SGD. Makassar →Rantepao (Tana Toraja): Bus de nuit avec la compagnie Primadona, 150.000 IDR (réservé à l’avance par notre hôtel), franchement super. Rantepao → Singkang (Lac Tempe) + Singkang → Bira : Taxi, 1.200.000 IDR :cher, roule comme un taré mais pas le choix. Bira → Makassar: taxi – 700.000 IDR si mes souvenirs sont bons.

les incendies de jungle sur Bornéo pour y planter ensuite des palmiers (huile de palme)
les incendies de jungle sur Bornéo pour y planter ensuite des palmiers (huile de palme)

Logement: Tana Toraja: 2 premières nuits à Rantepao, au Duta 88 Cottages (perycosa@yahoo.com): très charmant même si un peu sommaire, personnel à l’arrache mais serviable et souriant, et pas cher. La troisième nuit chez l’habitant (voir excursion) lac tempe et Bira

Duta 88
Duta 88

Excursion: 4 jours pour 4 personnes organisés avec l’hôtel directement; compris guide + voiture les deux premiers jours (1 jour dans le Sud de Rantepao, un jour dans le Nord) + 2 jours de treks tout compris dans le Nord Ouest. Je n’ai plus le prix en tête malheureusement, mais c’était bien cher. Le guide s’appelait Usman, il était très bien, il parlait anglais et italien: usmanaco2@gmail.com , +62(0)85255181617.

Restauration: Plein de bonnes choses: du porc pamerasan (ils ne sont pas musulmans ici), du poulet cuit dans des troncs de bambous (pa’piongs) et du bon steak de buffle, du coup.

A ne pas manquer: Emmener sa fille gothique et rebelle de 14 ans pour qu’elle puisse comprendre que le métier de boucher, c’est pas fait pour elle, comprendre que pour certains peuples, l’enterrement, ça peut se transformer en une énorme bamboula! faire un trek et dormir chez l’habitant au milieu des rizières: inoubliable…

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Plus d’infos pratiques sur Indonésie

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RÉCIT

Arrivée matinale à Rantepao, direction notre hôtel, où on prépare avec Perry, le gérant, nos quatre jours sur place: pendant que le papa de Mathieu prend 257 photos de notre auberge, on négocie, ça se voit qu’on a de l’argent, mais pas tant que ça quand même, on finit par trouver un arrangement, une belle défaite de notre côté mais qu’on ne regrettera vraiment pas à la fin du séjour.

Pourtant nom de dieu je lui avais dit à Mathieu, qu’il fallait qu’il apprenne à négocier comme un boucher:

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1er jour:

Virée en voiture dans le Sud.

1ère étape, Marché de Bolu (tous les 6 jours)!

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C’est un peu la foire du trône version chikungunya, on est en place, surtout Mathieu, quand il se vautre dans la marre aux vaches. Moi je l’ai pas vu se ramasser, c’est les sifflets de la foule et les rires des cochons qui m’ont alertée.

La marre qui a sournoisement attirée Mathieu, on se trop comment
La marre qui a sournoisement attirée Mathieu, on ne sait trop comment
Ça a l'air barbare, mais en vrai ils traitent vraiment bien leur animaux: ici un cochon qui vient d'être vendu
Ça a l’air barbare, mais en vrai ils traitent vraiment bien leur animaux: ici un cochon qui vient d’être vendu
paniers en osier
paniers en osier
Toutes les couleurs du marché
Toutes les couleurs du marché

Culture:

Les bœufs sont sacrément chers: jusqu’à 200 millions de roupies. Mais à ce prix-là, rassurez-vous le buffle est vraiment moche: les Albinos sont bien plus couteux que les autres.

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Pourquoi achète-on des bœufs? A 200 millions de roupiahs c’est pas pour faire du steak haché : C’est pour les sacrifier / les massacrer / les éventrer / les décapiter (et les manger) tout ça dans un esprit de joyeuses fêtes, lors des enterrements. Comme ça, le mort, il a une espèce de traineau de Noël qui l’emmène au paradis (qui est au sud de Sulawesi pour les Torajas). Plus il y a de taureaux morts, plus il arrive vite et bien à destination. Très cool. A la base, il y avait quelques esclaves qui étaient sacrifiés dans la masse.

Et quand j’associe fête et enterrement, ce n’est pas une blague! Explications plus bas!

 2ème étape: les tombes de Lemo

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Trop beaaaaau, j’adore les tombes, la mort et tout et tout!

En vérité, je vous le dis, c’est vraiment joli: les maisons traditionnelles avec le toit en “plantes”, les rizières, la douceur de la vallée, et le calme de la spiritualité.

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Les tombes sont à l’intérieur de caveaux creusés dans la roche. A l’entrée, des Tau-Tau: des statues en bois représentant le mort: pépé dans son fauteuil, mémé en train de coudre des feuilles de bananiers…

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il faut zigouiller plus de 25 buffles pour avoir la chance d’avoir son tau-tau. Parfois (tous les 5-10 ans) ils sortent les morts du caveaux pour fumer une cigarette ou discuter un peu avec eux… une réunion de famille quoi …

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Mais où est Pépé?
3ème étape: les tombes de bébés

Attention, minute émotion à Sanggalla

Culture:

Vous l’aurez compris, la tradition consiste à enterrer les morts dans des rochers… sauf que ce n’est pas applicable à vraiment tout le monde: les nouveau-nés sont eux, enterrés dans les arbres…

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Par nouveau-nés, on entend les bébés qui n’ont pas encore de dents. Par arbre, on entend un trou dans un tronc immense refermé par un plaque de bois.

Avec le temps, l’arbre va refermer le trou, et “avaler le bébé”.

Pourquoi? Parce-que les Torajas croient que l’esprit du bébé pourra continuer à grandir et s’épanouir avec l’esprit de l’arbre… bel au-revoir….

4ème étape: ballade dans les rizières et Ke’te Kesu

Cette dernière étape est plutôt tranquille.

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Super paysages, plein de rizières, de maisons qui affichent des cornes de buffles a l’entrée, une vieille dame sans dent mais la bouche pleine de substance rouge qui nous invite dans sa maison , un peu comme ça:

photo du site www.baliautrement.com
photo du site www.baliautrement.com

ou comme ça:

sang

Dommage qu’on se soit tous endormi dans la voiture.

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Puis direction Kete Ketsu, un village du pays Toraja.

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Culture:

On y admire ces maisons au toit si particulier, appelées Tongkonan: plus le toit est haut et plus le statut de la famille est élevé. Les maisons sont alignées dans un axe Nord Sud, et en face sont alignés des greniers à riz, sur pilotis (pour éviter les rongeurs). On ne sait pas trop d’où vient cette forme de toit : certains disent qu’il s’agit de cornes de taureau (« cornuto »!) , d’autre de la forme des bateaux par lesquels les torajas seraient arrivés sur l’ile.

Elles sont toutes ornées des mêmes couleurs:

  • Noir: la mort
  • Rouge: le sang
  • Blanc: la paix
  • Jaune/orange: humains

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Bref Kete Katsu, le village carte postale du pays toraja: des jolies maisons, et plein d’os humains dans l’arrière -village.

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Tout va toujours bien au pays des Belzébuths.

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2ème jour:

Grosse fiesta à l’enterrement

Nous sommes invités par notre guide à rejoindre les funérailles de son grand oncle au troisième degré. Trop de la chance, on se sent super privilégiés d’être invités à la fête… Sauf que l’oncle est en fait une dame, et il semblerait que ce soit la grand oncle au troisième degré de tous les guides à touristes du coin.

Pas grave, nous ce qu’on veut voir, c’est du sang, et du sang il va y en avoir, il suffit de voir le sol quand on arrive (âmes sensibles, s’abstenir d’ouvrir la photo en grand en cliquant dessus)

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Mais avant ça, culture (ça fera de mal à personne, et encore moins à mon petit frère):

Les Torajas sont chrétiens. J’en profite pour remercier les hollandais, sans eux les Torajas feraient encore certainement du feu avec leur ongle, se peigneraient les cheveux avec des arrêtes de poisson, et n’écouteraient pas du Whitney Houston. Mais ils sont également animistes, c’est-à-dire qu’ils croient aux esprits en tout être vivant. Un peu comme Pocahontas.

Un point important de leur culture, c’est la vie après la mort, et la cérémonie d‘enterrement, qui s’organise parfois plusieurs années après la date officielle de décès, toujours de Juillet à Septembre. J’ai ma petite théorie sur cette période, et je ne suis pas peu fière de la partager ici : nous y étions en juillet, et les rizières étaient jaunes, ou déjà coupées: c’est donc la période de la fin de la récolte: la mort de la tige de riz en quelques sortes. Donc c’est aussi le moment de célébrer la mort. Voila ma théorie.

Le chef de cérémonie
Le chef de cérémonie
les potes du chef de cérémonie
les potes du chef de cérémonie

Bref, vous n’aurez pas omis de sursauter lorsque vos yeux ont lu : “la cérémonie de l‘enterrement, qui s’organise parfois plusieurs années après la date officielle de décès”… quoi? Quoi? Quoi? Me direz-vous?

En fait, le jour de l‘enterrement, c’est la grosse bamboula dans le village: festin, danses, chants, guirlandes, alcool, famille, amis, amis d’amis et politiques corrompus se rassemblent, tout ça au frais de la famille du défunt: ça coute un max, sans compter les dizaines voir centaines de buffles et cochons qu’il va falloir égorger…

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Bref il faut du pognon. Et donc du temps, parce-que le temps, c’est de l’argent. Et le cadavre en attendant? Les torajas disent qu’il est malade. Ils le gardent dans un état de momie dans une des chambres de la maison (je vote pour la chambre de mon petit frère), et le défunt continue de participer à la vie: on lui offre des cigarettes, de la soupe, des couvertures quand il fait froid.

Avantage: le jour de l’enterrement (qui en fait dure 5 jours), ben tout le monde est super content, ce qui est tout bénef pour nous:

On est accueillis sur la place de village, dans des structures en bois construites spécialement pour la bonne occasion. Le mort, est une morte, décédée il y a deux ans, qui semble avoir eu beaucoup d’amis dans sa vie vue le nombre d’invités.

Structures installées juste pour la fête de l'enterrement.
Structures installées juste pour la fête de l’enterrement.

Le cercueil arrive, les hommes commencent une danse en rond assez sobre et spirituelle.

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Plongés dans ce spectacle, on nous offre gentiment du gras de porc à manger et de l’alcool de palmiers (gentiment dégoutant) et on offre en échange de ce chaleureux accueil autour d’une tombe, des paquets de clopes. Ils sont trop contents, on a du bien choisir. Les autres invités arrivent eux avec des bœufs et des porcs : ça annonce un massacre suivi d’un bon ragout!

S’en suit la messe, interminable. On en profite pour aller faire pipi avec Mathieu dans les bois. Je surveille, il surveille, des gamins passent devant moi hilares: en fait, il surveillait pas.

C’est ce moment que choisi la foule pour débuter la procession: on va promener le cercueil autour du village une dernière fois.

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plus de spiritualités, de prières, et de morceaux de porc, place aux effets de l’alcool de palme, à la testostérone, aux batailles d’eau et aux ados boutonneux qui n’ont qu’un objectif: retourner le cercueil. Ça crie, ça chante ça rigole, bref on s’amuse!

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Les femmes suivent le cercueil dans un cortège sous un drap rouge... comme le sang
Les femmes suivent le cercueil dans un cortège sous un drap rouge… comme le sang

Dans l’effervescence qui monte, la famille décide de balancer des billets par la fenêtre, et des cartons de bières, histoire de bien s’assurer que personne ne va pleurer sur la tombe.

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Retour au village du cercueil, que l’on place sur un trône.

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Le moment de gloire arrive alors: le sang! Enfin!

Un jeune homme s’approche du gros buffle, au regard bovin. Le buffle, pas l’homme. Et la minuit heure du crime, l’homme sort son couteau sa poche, ou plutôt sa machette de son étui de 30cm, et déchire la gorge du pauvre animal, qui lance un dernier regard plein d’incompréhension à son maître: mmmmmmais meuh, je croyais meuh que c’était pour la vie entre nous meuh… monde cruel meuuuuh.

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Et pourquoi ce dernier regard? Parce les maîtres s’occupent de leur buffle encore plus que de leurs enfants: les buffles sont lavés, promenés, nourris avec la meilleure herbe, et aimés toute leur vie!

Vous croyez qu'il a besoin d’associations-comités de défense des bêtes et d’antidépresseurs?
Vous croyez qu’il a besoin d’associations-comités de défense des bêtes et d’antidépresseurs?

Comme tout un chacun sait, notre monde manque malheureusement terriblement de violence et de viande fraîche, nous serions donc restés volontiers pour le combat de buffles qui se préparait, mais d’autres paysages vers le Nord nous attendaient pour cette fin de journée:

les tombes de Pana, surprenant!
les tombes de Pana, surprenant!
Le décor et la vue depuis BatuTumanga
Le décor et la vue depuis BatuTumanga
Les rizières interminables du côté de lempo
Les rizières interminables du côté de lempo
Les tombes de Lokkomata
Les tombes de Lokkomata

En conclusion de cette journée, j’en profiterais bien pour envoyer un message personnel: je vous aime très fort, papi et mamie, et promis, je ne ramènerai pas d’alcool de palme le jour J, juste la reconnaissance éternelle de tout vous devoir. Je ramènerai quand même peut être des côtes de porcs aussi.

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3ème jour

C’est parti pour 2 jours de marche dans les rizières, depuis Ke’pa (je ne saurais dire par contre le nom du village où on a dormi), après 2 bonnes heures de voiture.

Anecdotes:

  • Philippe porte très bien le rose

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  • Mathieu porte très bien mon sac
  • La voiture supporte pas très bien la route, enfin le chemin,.. en fait c’est plutôt du gruyère.

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  • Quand je vois les enfants jouer avec les poules, je me dis que j’aurais du grandir a la ferme.
  • Quand je vois les enfants jouer avec les tiques incrustes sur la peau du buffle, je me dis que j’aurais du grandir dans la jungle
  • Quand je vois les enfants jouer avec un bouchon de bouteille en plastique, je me dis que j’aurais du grandir avec des pauvres
  • Quand je vois les enfants et Mathieu jouer avec un ballon en bois, je me dis que j’aurais du grandir garçon

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  • Quand je vois les adultes jouer avec les coqs et leurs scooters, je me dit que finalement ça va, j’ai bien grandi.

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  • Douche froide dans une salle de bain plus que sommaire: re-checked (easy par rapport a l’Inde).
  • La nuit dans le village d’Asterix le Toraja: un pur plaisir d’évasion

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4ème jour

3 heures de marche aussi belles que la veille…

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…et petit à petit, retour à électricité: on part pour le lac tempe. Au revoir les Torajas.

A noter: La route est magnifique les deux premières heures depuis Rantepao.

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Suite du parcours: Lac Tempe et Bira
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